Mémoire                                                           Open Air
L’exposition d’images dans nos rues

Dans ce vaste espace qui est la rue,
comment se présentent et se manifestent les expositions d'images d’art ? 
Dans quels espaces les trouvent-t-on le plus souvent ? 
Quel constat pouvons-nous faire ? 
Y’a t-il des typologies et des formes différentes d’expositions dans l’espace urbain ?



Un affichage sur les surfaces de la ville 
  1. Les grilles du Jardins du Luxembourg

Tout d’abord, une forme d’exposition observable dans l’espace urbain consiste en celles qui s’installent sur les supports de la ville. Un exemple éclairant est celui des dispositifs mis en place par le Jardin du Luxembourg à Paris. Alors en effet depuis 2001, le Sénat met à la disposition des exposants, contre paiement d’une redevance, la portion des Grilles du Jardin du Luxembourg comprise entre la porte Saint-Michel et la porte Odéon afin de permettre la présentation au public chaque année de deux expositions de photographies d’une durée de quatre mois. Ce sont des expositions qui sont accessibles à tous, gratuites, et visibles de jour comme de nuit.

Le public, en longeant les grilles du jardin, peut retrouver environ 80 panneaux, tous alignés, 
tous espacés de manière régulière et tous de même dimension (120 x 180 cm). 
Les grilles du Jardin du Luxembourg deviennent des supports comparables à des “murs”, transformant l'espace en une galerie à ciel ouvert. On observe une approche qui rappelle celle d’un musée, avec des toiles d’artistes encadrées et soigneusement disposées sur les murs. 













Exposition “Les routes du miel”, Jardin du Luxembourg, Paris, 
Septembre 2015 - Janvier 2016




Exposition “William Klein Sports”, Square de la Tour Saint-Jacques, Paris, Juillet-Août, 2024
Exposition “La beauté de Paris est indescriptible” de David Turnley, Hôtel de Ville, Paris,
Septembre- Novembre 2024


Couloirs du métro, station bastille, Paris







À la différence d’une exposition traditionnelle de musée, ici les murs sont des grilles qui laissent entrevoir les deux espaces, le parc et la rue. Mais aussi un cadre qui intègre dans cette présentation d’image un fond de nature. On retrouve un contraste entre les images modernes et la tranquillité du parc. Ce qui se voit comme une exposition qui vise le public à pouvoir combiner promenade et exploration artistique. Alors ce dispositif de panneaux qui se trouvent sur des grilles est assez généralisé et reproduit dans d’autres espaces en ville voire même dans de nombreuses villes. 

Toujours à Paris, c’est un dispositif facilement observable sur les grilles de l’Hôtel de Ville, celles du square de la Tour Saint-Jacques, sur le Pont Saint-Ange ou bien aux abords du Conservatoire national des arts et métiers (CNAM). 

Ces expositions sont disposées de manière linéaire, ce qui les rend facilement repérables, puisque tous les panneaux sont regroupés au même endroit. Cela permet au public de découvrir le contenu en suivant simplement le trottoir. Ce dispositif présente les images selon un schéma assez standard qui, en raison de sa répétition, devient redondant. Le public peut alors ressentir une certaine lassitude et un manque de surprise. A quoi ce schéma peut faire aussi référence ? Cette répétition linéaire de cadre d’images en ville, peut se rapprocher des couloirs de métro habillés de grands panneaux publicitaires tous identiques. 

Comme nous avons pu le constater dans les exemples donnés, ces expositions accrochées sur les grilles se trouvent souvent dans des secteurs de la ville fréquentés par un certain nombre de touristes et de passants. Ce sont également des lieux ciblés pour toucher un public plus ou moins sensible à la culture. Bien que ces expositions aient pour objectif de démocratiser l’accès à la culture, interpellent-elles réellement le public ? Est-ce que la forme de ce dispositif est assez pertinente ? Avons-nous d’autres déclinaisons de ces dispositifs ?















2.   L’exposition "Une saison au stade"

À l'instar des images sur panneaux qui sont standardisées et individuelles, nous pouvons avoir des expositions d’images d’art et photographique sur un schéma d’affichage qui se joue des dimensions. Ce dispositif passe par une impression des images et un placage, une composition sur des surfaces murales dans les villes. Dans le cadre des Jeux Olympiques de Paris 2024, la ville de Saint-Denis, en Seine-Saint-Denis, a présenté une exposition photographique "Une saison au stade"4 qui met en avant la diversité des publics dans les stades. C’est une exposition qui se retrouve non loin du Stade de France. 

La commune a utilisé des espaces muraux vides et inexploités pour y exposer les clichés des photographes Nadia Bijarch, Manolo Mylonas et Arthur Crestani. Cette présentation photographique constitue une véritable composition d’images qui dialoguent entre elles et qui occupent pleinement la surface. Le public, en prenant du recul, peut appréhender l'ensemble 
du contenu et saisir pleinement le sujet de l'exposition, et c’est une force cette disposition mais également un point négatif. En effet, cette composition fait référence aux espaces muraux dédiés à l'affichage public, des murs saturés d'affiches collées de manière sauvage ou pendant de grandes campagnes publicitaires. L'œil du public est déjà habitué à voir, dans son quotidien, des murs recouverts d'images.



4    “Une Saison au Stade”, Exposition photographique, ville de Saint-Denis, 
Avril 2024 - Été 2025 https://ville-saint-denis.fr/actualites/exposition-une-saison-au-stade






Mur de l’exposition “Une saison au stade”,
Saint-Denis, 2024
Campagne publicitaire Loewe,
Steven Meisel, Paris, 2018









 3.   L’exposition “La renaissance de Notre-Dame”

Parfois, on va avoir recours à l'idée de recouvrir une surface pour cacher et/ ou dissimuler  
une activité en cours, un chantier par exemple. Contrairement aux dispositifs sur les grilles, 
ici nous avons des "murs" pleins présentant des images de différentes tailles. Ce jeu d’échelles apporte une dynamique visuelle plus marquée et fonctionne bien. De plus, cela permet aux maîtres d'œuvre du projet de fournir davantage d’informations sur le contenu de l'exposition, grâce à une présence importante de textes explicatifs. Le public se voit ainsi offrir un objet graphique et informatif complet. Bien que nous soyons en ville, un lieu animé par le bruit environnant, les mouvements de foule et la circulation routière, est-ce que l'exposition, située 
au pied d'un chantier, permet une bonne concentration pour la lecture et la réflexion devant 
ces images et photographies ?
Exposition photographique “La renaissance de la cathédrale” 
sur les parois du chantier de reconstruction de Notre-Dame, 
JCDecaux SA, Paris, 2020



Installation "Inside Out", Menée par l’actrice Charlotte Le Bon, Lyon, 2013
Installation “Inside Out” au Palais de Tokyo, 2013
4.   Le programme “Inside-Out”

L’affichage peut occuper davantage de surfaces et s’étendre à de nouveaux espaces. Cela rappelle l’initiative lancée par l’artiste JR avec son projet “Inside Out”5. Inspiré par sa pratique artistique consistant à coller des photos dans l’espace urbain, JR propose, à travers ce projet, qui tourne dans le monde entier depuis sa création en  que le public affiche ses propres portraits dans la rue pour créer de grandes fresques monumentales. Chaque installation réalisée par les équipes d’”Inside Out” est portée par la participation active des habitants des villes concernées.

Mais comment cela fonctionne-t-il ? Les équipes arrivent dans les villes avec un camion équipé d’un photomaton. Le public est invité à y entrer pour se faire photographier. Grâce à un mécanisme similaire à celui des cabines photo classiques, les portraits sont imprimés presque instantanément. Ensuite, les participants collaborent pour coller ces photos et composer ensemble une fresque de portraits.

Ce projet soulève des questions, notamment sur sa temporalité et sur les parallèles avec les exemples précédents. Cette exposition présente plusieurs statuts : à la fois une installation et la création d’un événement. Réalisée à partir de collages, l’exposition s’efface et disparaît progressivement avec le temps. Ce dispositif illustre comment l'exposition dépasse les simples surfaces murales pour s'étendre et s'intégrer pleinement dans l'espace urbain. À travers le prisme de ce projet, la rue devient un lieu d'investissement, permettant le déploiement de l'exposition.


5    “Inside-Out” programme crée par l’artiste JR en 2011, 
https://www.insideoutproject.net/fr/about





    Un nouvel espace dans la rue 
    Certaines expositions que l'on peut retrouver dans l'espace urbain, peuvent être définie comme des constructions qui se place et qui se pose à différents lieux dans l'espace urbain. Où retrouve-t-on ces expositions ? Alors c’est dans des lieux de passages ou de transit qu’il nous arrive de nous retrouver face à exposition. On peut citer les parvis de gare, les places publiques ou même encore sur le long de grands boulevard et grandes rues. 
    1.    Un espace dessiné avec des structures légères

    Ce qui nous amène à aborder un premier exemple: les expositions orchestrées par la SNCF Gares & Connexions. La SNCF Gares & Connexions illustre parfaitement son engagement culturel à travers les expositions qu'elle organise sur les parvis des gares. Dès notre arrivée 
    au abords d’une gare, Gare de Lyon, St Lazare à Paris ou celle de Marseille St Charles 
    par exemple, nous sommes face à des expositions photographiques réalisées en collaboration avec des partenaires prestigieux tels que l'UNESCO en 2021 ou encore  Reporters sans frontières en 2019. 

    Derrière cette exposition, quels sont leurs objectifs ? Selon la SNCF, leur objectif majeur est 
    de proposer au visiteur, une expérience qui sensibilise le public à des thématiques importantes tout en rendant la culture accessible à tous. Nous pourrions ajouter que ces expositions amènent aussi le futur voyageur à entrer dans une position de voyage et de découverte de paysages et 
    de nouveaux décors. C’est le cas pour cette exposition (ci-dessus) sur l’océan. Ces événements viennent dynamiser ces grands espaces aux abords des gares où un flux important de personnes circulent au quotidien de jour comme de nuit.  

    Mais alors quelle forme prend cette exposition ? L’exposition prend la forme d’une installation avec de grandes structures/ panneaux répartis tout en formant une sorte de collection d'images sur le parvis. Ces structures autoportantes, montées sur des socles, évoquent des cimaises 
    – ces panneaux souvent utilisés dans les galeries et musées traditionnels pour délimiter 
    un espace d'exposition - Malgré leur grande taille, elles sont conçues pour ne pas gêner 
    la circulation des voyageurs entrant ou sortant de la gare.



















    Exposition “1 Océan”, SNCF Gares & Connexions/ UNESCO, 
    Gare de Lyon, Paris, Photo de David Paquin, 2021













    Alignement des panneaux permettant 
    une circulation libre au travers
    Chaque panneaux présentent des images mais la plupart du temps des photographies en grand format occupant toute la surface, cela rend les images visibles de loin et facilitant leur lecture. Les images occupent une place centrale, encadrées par un cadre blanc de manière à évoquer celle d'un tableau, ce qui confère à chaque image une importance et un statut particulier. Le public peut circuler librement autour de ces structures et explorer l'exposition à leur rythme, profitant d'une expérience visuelle en plein air. On remarque que cette installation crée un nouvel espace à l'intérieur d'un autre, sans être complètement fermé, permettant ainsi au public de le traverser ou même de le contourner.

    Dans les structures autoportantes installées dans l’espace urbain, on peut également trouver d’autres formes qui invitent le public à circuler autour d’elles, des espèces de totem qui tiennent sur eux-même. Leurs formes induisent un placement et un espace différents des panneaux linéaires.





    Espace que dessine l’exposition dans l’espace urbain






    2.    Un espace dessiné par une micro-architecture

    Ce type de dispositif d’exposition est très répandu dans nos villes, mais existe-t-il d’autres formes de dispositifs qui contribuent à structurer un espace en milieu urbain ? Si les panneauxet totems délimitent un nouvel espace dans la rue, pouvons-nous construire dans l’espace urbain pour créer un espace d’exposition ?  C’est dans le cadre de la biennale des images du monde : Photoquai6, à l’initiative du musée du quai Branly Jacques Chirac, que les touristes et parisiens pouvaient retrouver tous les deux ans, un espace éphémère imaginé par le designer Patrick Jouin, sur les quais de Seine face au musée. Cette exposition peut être caractérisée comme une micro-architecture, en l'occurrence une scénographie conçue pour cet événement. Ses parois compartimentent légèrement l’espace et reproduisent une mise en scène similaire à celle que l’on pourrait trouver dans une salle d’exposition.

    Ce cas précis nous présente une exposition à grand budget, mobilisant des moyens techniques considérables. La construction d’une telle structure nécessite une main-d’œuvre plus importante que dans les exemples précédents.Un dispositif d’éclairage a été ajouté pour permettre de découvrir et visiter cette exposition même de nuit. Placée dans l’espace public, l’exposition ne dépend pas du mobilier urbain et se présente comme un objet autonome, doté de sa propre identité. 

    Après avoir observé des expositions d’images et de photographies installées dans l’espace urbain, utilisant des techniques telles que l’accrochage, l’affichage, la construction d’espaces avec des structures autoportantes ou des micro-architectures : existe-t-il un dispositif ou une approche qui ne nécessite ni ajout ni construction dans l’espace 



    6    “PhotoQuai : Biennale des images du monde”, 
    par le Musée du Quai Branly Jacques Chirac, Paris, 
    de 2007 à 2015

    PhotoQuai, 1ère édition, 2007, Paris
    PhotoQuai, 4ème édition, 2013, Paris 

     





    Campagne 2024 The Row, Maybe, Paris



    Un jeu avec l’existant 

    L’exposition d’images et photos n’est pas obligatoirement à s’installer et/ou de s’ajouter au mobilier urbain mais elle peut aussi s'insérer dans ce qui est déjà présent. On peut notamment se pencher sur les cadres et panneaux dédiés à la publicité. En effet, la publicité, très présente dans nos rues, se manifeste sous diverses formes et se trouve majoritairement sur des panneaux qui lui sont dédiés. On peut évoquer les colonnes Morris dans les grandes villes, comme à Paris, les écrans géants LED rendus célèbres par Times Square à New York, ou encore ceux de Piccadilly Circus à Londres, mais aussi les panneaux d’affichage dans les rues et dans les transports, tels que le métro, les abribus ou ceux disposés aux abords des routes. 














    Ces emplacements sont stratégiques, car ils offrent à la publicité une opportunité unique de s'adresser directement au public, quel que soit l'endroit où il se trouve, et de l'inciter à la consommation. Lors de ses déplacements, le public est constamment entouré de publicités. Ces supports sont profondément ancrés dans le paysage urbain, intégrés à l'aménagement des rues et contribuent à la composition du décor. Et c’est avec ces dispositifs que l’on peut se retrouver face à une forme réappropriation de ceux-ci afin de les détourner pour y disposer des expositions d’images mais ici dans un cadre culturel. 




    “EXI(S)T”, Exposition photographique, 
    La Fabrique des regards, Bruxelles,
    juin et septembre 2020








    1.    L’exposition “A Couple of Them”
    Dans quel cadre pouvons-nous nous retrouver face à une réappropriation des espaces publicitaires ? Cela peut être à l'initiative d’une institution culturelle ou même d’une agglomération directement. C’est d’ailleurs une démarche qu'emprunte depuis plusieurs années le service des commandes publiques artistiques de Bordeaux Métropole. Le service est chargé de créer des dispositifs et d’apporter une ouverture à la culture et l’art dans l’espace public dans la métropole bordelaise. 

    Parmi leurs différents projets, l’exposition “A Couple of Them”7, dévoilée au public en juillet 2024 pour une durée d’un mois. Cette exposition photographique qui invite le public à découvrir le long des grands boulevards bordelais le travail du duo d’artistes Elsa & Johanna. Cette exposition s'empare des panneaux publicitaires des abribus présents tout au long des grands boulevards. La liste d'œuvres comporte plus de 80 photographies qui ont été réparties dans les 19 abribus. Ce projet nécessite à la métropole de louer ces emplacements qui sont habituellement loués à des publicitaires. 

    Nous sommes en droit de nous poser plusieurs questions : comment le public perçoit-il qu’il se trouve face à une exposition ? Est-ce que les passants s'arrêteront à chaque arrêt de bus pour regarder les photographies ? Enfin, en fonction de la durée de la programmation de l'exposition, le public a-t-il suffisamment de temps pour la découvrir ? Cette exposition s'adresse-t-elle uniquement au piéton, aux personnes étant en attente de leurs bus ou s’adresse-t-elle aussi aux automobilistes ? 

    Dans ce cas, c'est la métropole qui est intervenue pour offrir à ses habitants une exposition utilisant les panneaux publicitaires des abribus, mais cela peut également s'inscrire dans une démarche plus ambitieuse. C'est un cas qui se manifeste dans une commune beaucoup plus petite que Bordeaux, en Haute Marne, à Saint-Dizier.



    7    A Couple of Them” de Elsa & Johanna, 
    Exposition photographique, Bordeaux Métropole, 
    Bordeaux, 10 juillet - 12 août 2024
     Images de prévisualisation des photographies sur les abribus, Bordeaux Métropole
    Plan de l’exposition “A couple of them”, extrait du dépliant, 
    Bordeaux Métropole
     Images de prévisualisation des photographies sur les abribus, Bordeaux Métropole









    Photos de panneaux publicitaires laissant place 
    à des œuvres d’art dans la commune 
    de Saint-Dizier, 2023




    Photos de panneaux publicitaires laissant place
     à des œuvres d’art dans la commune 
    de Saint-Dizier, 2023


    “À Saint-Dizier, des œuvres d'art ont remplacé les panneaux publicitaires“, 56’, Reportage BFMTV, Novembre 2024



         2.    Le programme “La Beauté Sauvera le Monde”

    C’est en avril 2021, en pleine pandémie du COVID19, alors que la culture était enfermée et inaccessible, que la commune Saint-Dizier à la demande du Maire Quentin Brière, qu’ils décident de créer un programme culturel inédit nommé : “La Beauté Sauvera le Monde”8. L’objectif de ce programme était de pouvoir apporter au cœur de la vie quotidienne de tous les habitants des œuvres d’art intemporelles, issues de grandes collections de musées. Ici le dispositif ne concerne pas que les abribus de la commune mais tous les emplacements publicitaires de la ville. Le maire cherchait au lancement du programme de mettre de “l’art et du beau à portée de tous”9.

    “Le symbole, évidemment, est fort – le panneau publicitaire, il est là pour vendre, il est moche, et là on offre quelque chose qui est à la fois gratuit et beau.”10

    Cette initiative invite les habitants à découvrir gratuitement des œuvres d’art célèbres comme des toiles de Botticelli, de Renoir ou encore de Klimt, le tout sous forme de reproductions agrandies et affichées sur ces panneaux. Ces œuvres sont pour la plupart dans les collections de musées qui lui sont payantes.


    “Je crois intimement que la beauté peut sauver le monde et je rêve d’une France où une fois par an, des milliers de panneaux publicitaires sont remplacés par des œuvres d’art accessibles et visibles de tous dans une démarche d’humanisation de l’espace public.”11

    Chaque année, depuis son lancement, sur une durée d’un mois, la commune prend possession de tous les emplacements panneaux publicitaires et emmène ses habitants dans des thèmes qui sont différents. Malgré une initiative qui se voit porteur d’un bon message et de bonne volonté, il est assez difficile de savoir si les habitants se saisissent de programme comme une réelle exposition ou plutôt d’un décor visuel différent de leur quotidien. En effet, ces panneaux publicitaires sont disséminés un peu partout dans la ville. Ceux situés sur les places ou dans les rues permettent aux piétons de s'arrêter pour les observer.

    En revanche, les images affichées sur les panneaux situés dans les zones industrielles ou en bordure de la rocade ne peuvent être aperçues que rapidement, d’un coup d’œil, par les passants en mouvement. De plus, les reproductions des œuvres d’art exposées ne se suffisent pas à elles-mêmes : du texte a été ajouté sur les images. On y trouve le nom du programme, “La Beauté Sauvera le Monde”, le nom de la commune, ainsi que le titre de l’œuvre et le nom de son auteur, le tout affiché en grand sur les images. Des éléments qui font référence et donnent l’impression d’être face à une publicité.

    Les institutions semblent déterminées à inviter le public à explorer une véritable galerie à ciel ouvert. Pour ce faire, elles s'appuient sur des systèmes d’affichage déjà bien ancrés dans l’espace urbain, mettent en place des dispositifs qui transforment et créent de nouveaux espaces, et investissent des emplacements habituellement dédiés à la publicité.

    Cependant, l’espace urbain reste largement dominé par la publicité, qui pousse le public à consommer. Dans ce contexte, même lorsque des dispositifs exposent des images d’art, le public ne risque-t-il pas d’être confronté à une confusion entre deux sphères : celle de l’art et celle de la publicité ? Cela soulève une question sur leur statut respectif : les images d’art ne finissent-elles pas, à leur tour, par devenir des objets de consommation ?





    8    “La Beauté Sauvera le Monde”, programme culturel d’exposition d’oeuvres d’art 
    dans l’espace urbain, Saint-Dizier, France, créé en 2021
    9    Extrait de la présentation du programme sur le site “La beauté sauvra le monde”, https://www.labeautesauveralemonde.fr/
    10    Citation de Quentin Brière, maire de Saint-Dizier, extraite de la conférence 
    avec organisée par la Fédération Française des Trucs qui Marchent, 
    en décembre 2022, https://youtu.be/wp1sdZgLzqI
    11    Citation de Quentin Brière, maire de Saint-Dizier,
    https://www.labeautesauveralemonde.fr/



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