Mémoire                                                           Open Air
Introduction


Depuis les débuts de la société moderne, l’exposition dans l’espace urbain s’est imposée comme un moyen clé de diffusion culturelle et d’éducation populaire. À Paris, dès le XVIIIème siècle, l’espace urbain a figuré parmi les premiers lieux d’exposition publique. Des peintres y installent leurs échoppes, mais nous retrouvons notamment les « refusés » de l’Académie. En parallèle de ces initiatives individuelles, les foires et les fêtes religieuses à Paris ont offert l’opportunité de créer des espaces temporaires d’exposition, expérimentant de nouvelles façons de présenter les œuvres et mettant en lumière une sociabilité artistique naissante. 

À ce sujet, la place Dauphine, à l’occasion d’une fête d’origine médiévale, organisée par la paroisse de Saint-Barthélemy, offre un exemple d’espace urbain temporairement investi comme lieu d’exposition. Traditionnellement, le Pont-Neuf et les édifices longeant l’angle nord de la place étaient décorés de tableaux et de tapisseries suspendus aux fenêtres et aux parois, pour accueillir la procession de fidèles. Place publique, espace d’exposition et lieu religieux, la place Dauphine se voyait investie, le temps d’une journée, d’une identité nouvelle, en devenant le théâtre de ce qui sera surnommé l'Exposition de la Jeunesse, où de jeunes artistes en quête de moments de sociabilité et de reconnaissance artistique, exposent leurs travaux à côté d’amateurs et d’artistes de l’Académie.
En ce qui concernait les modalités d’accrochage des tableaux, l’exposition répondait à des enjeux presqu’exclusivement aléatoires1

Ces expositions publiques, bien que informelles, ont influencé l’organisation et les standards du Salon et de l’Académie, notamment en ce qui concerne l’agencement des espaces et la mise en visibilité des œuvres. Ces événements réguliers permettaient aux artistes d’exposer leurs créations dans des lieux variés tels que les églises, les trottoirs ou des vitrines démontables. 

Plus tard, Paris a renforcé son rôle de scène majeure de cette pratique, notamment grâce aux Expositions Universelles. Ces événements transformaient temporairement l’espace public en une vitrine mondiale de l’innovation et de la culture, marquant le début d’une tradition où la ville devenait un acteur central dans la valorisation des œuvres tout en rendant la culture plus accessible à tous.


1    Pamela Bianchi, “Les espaces d’exposition alternatifs du 18 siècle : 
entre sociabilité et contre-culture” dans Dix-huitième siècle (n° 50), p 85 - 97, 
2018, https://shs.cairn.info/revue-dix-huitieme-siecle-2018-1-page-85?lang=fr




Gaspard Duché de Vancy, Exposition de la Jeunesse à place Dauphine, 1780 
(Paris, musée Carnavalet)

À partir des années 1970, une évolution majeure s’opère avec la montée en puissance de la notion du hors les murs. Cette notion développée dans le cadre de l’institution muséale, marque une volonté d’ouvrir les collections au-delà des espaces traditionnels. Les musées sortent de leurs bâtiments pour investir rues, places, et jardins. 

Avec ces démarches, le hors les murs répond à un double enjeu : rendre l’art accessible à tous tout en s’intégrant dans un environnement urbain dense. Ces événements se sont grandement multipliés. Cette pratique pose cependant une question essentielle : comment ces expositions se distinguent-elles au sein d’un environnement urbain déjà saturé d’informations et de stimuli visuels ? 
Comme le définit Roland Barthes, une information visuelle est « un message capté instantanément par la vue, souvent conçu pour être à la fois immédiat et percutant »2

Or, la ville moderne est un vaste espace de communication où les publicités, les affichages 
et les écrans numériques rivalisent pour capter l’attention des passants.


En tant que futur designer d’exposition, cette saturation de l’espace public soulève un premier questionnement : comment une exposition d’images d’art et de photographies peut-elle se démarquer dans un tel contexte ? Quelles sont les différentes formes d'expositions d'images d'art et de photographies dans l'espace urbain ? Comment ces dispositifs s’inscrivent-ils dans une dynamique de dialogue avec la ville et le public ? 

Pour comprendre ces enjeux, il est nécessaire de revenir à la définition même d'une exposition. Selon Jean Davallon, “une exposition est un dispositif narratif et sensoriel qui organise une relation singulière entre des objets, des espaces et des publics”3. Ce mémoire s’attachera à explorer plusieurs axes de réflexion : Ces interrogations visent à enrichir notre compréhension de la place d’une exposition d'images d’art et de photographie dans l’espace public, tout en ouvrant des perspectives pour les futures pratiques du design d’exposition.







2    Roland Barthes, La Chambre claire : Note sur la photographie
Éditions Gallimard, Paris, 1980, 200p
3     Jean Davallon, L'exposition à l'œuvre: Stratégies de
communication et médiation culturelle
, L’Harmathan, 2000, 384 p



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